« L’œil, d'abord, glisserait sur la moquette grise d'un long corridor, haut et étroit. » Perec, Les choses.
On entre.
Tout d'abord, on est frappé par la maculation inattendue qui nous accueille.
Le large blanc disparaît au profit de l'image, immédiate, qui s'impose à nous, sans violence aucune.
On entre comme si on regardait par une fenêtre ouverte.
Dehors, de l'autre côté : la vie.
Et de spectateur, on devient acteur, vivant dans le vivant, voyant enfin.
La page est claire, ordonnancée comme, architecturale et évidente et malgré l'absence absolue de repère de marche à suivre ou mode d'emploi, on s'approprie le plan.
Le voici qui devient nôtre, ouvert. Offert.
Alors, on entre.
Où l'on parle de clarté, Laure nous propose de « trouer l'opacité ».
Quelle meilleure entrée en matière, entrée en la matière ?
Mémoire, Avenir, Trouée … Invention du vide.
La fenêtre s'ouvre, enjambons-la, passons de l'autre côté du miroir.
Les choses s'improvisent lumière, obscurité, vide, poussière, main qui cherche, qui trouve.
Découverte, Désirade.
Le vide s'efface, la forme se devine, se détache.
Le cliché comme le regard deviennent les nôtres.
L'intime se dévoile, nous restons silencieux ;
La pudeur nous envahit.
On passe d'un tableau à l'autre, d'une histoire muette à l'autre, d'une humanité à l'autre et c'est d'ailleurs par son sens profond de lire l'humanité brute que Laure nous permet de redécouvrir la nôtre.
Nous allons passer beaucoup de temps à feuilleter ces tranches nettes de vie grouillante ou silencieuse, ces buissons de murmures, main d'attente au rebord d'une fenêtre, envahissement grouillant de la fête foraine.
On quitte le parcours de l'architecte pour prendre pied sur le chemin de la photographe.
On sent sa main qui enserre la nôtre.
On a envie de se laisser guider.
Pourquoi d'ailleurs ne pas se laisser guider ?
On entre chez Laure et voilà que nous sommes chez nous.
Alban Koziol